Cette
critique est plus officielle que les dernières publiées dans mon blog, car elle
faisait figure d'essai pour ma candidature à un magazine culturel en ligne! Je
vous redonne plus de nouvelles la-dessus bientôt!!
Le roman
tant attendu de Grégoire Delacourt, La première chose
qu’on regarde, est paru en mars dernier chez JC Lattès. Après avoir reçu un
accueil des plus chaleureux au Québec pour La liste de mes
envies l’an dernier, Delacourt tenait à faire paraître son livre en primeur
chez nous (une exception pour un auteur français!)
Arthur
Dreyfuss, jeune mécanicien, vit seul dans une petite maison à Long, un petit
village situé au nord de la France. Sorti trop tôt de l’enfance suite à la mort
préméditée de sa petite sœur, à la disparition de son père quelques années plus
tard et à la grande tristesse de sa mère, Arthur mène aujourd’hui une existence
morne et tranquille, qui se résume à travailler le jour au garage de PP et à
écouter des séries américaines le soir. C’est d’ailleurs au cours d’une de ces
soirées typiques, à la mi-septembre, que nulle autre que Scarlett Johansson
frappe à la porte du jeune homme. La belle, qui s’est sauvée du Festival de
Deauville à quelques kilomètres de là, cherche un endroit pour vivre quelques
jours tranquille à l’abri des paparazzis. Sept jours de bonheur attendent
Arthur Dreyfuss qui, malgré sa belle gueule (Éloïse, jolie serveuse du
casse-croûte du village, dit qu’il ressemble à Ryan Gosling mais en mieux!), n’a
pratiquement jamais touché une femme.
L’auteur du
très grand succès de 2012, La liste de mes
envies, a osé inclure dans son histoire une personnalité réelle, Scarlett
Johansson, célèbre actrice et l’une des plus belles femmes du monde. Avec
humour et honnêteté, Grégoire Delacourt ne dit pas, il montre. Les images sont
simples et vivantes, presque naïves. À tout moment, on sourit, souvent en
constatant que nous réagissons tous de la même façon face aux gens célèbres. Si
Arthur Dreyfuss ne croit pas à ce qui lui arrive, il ne veut cependant qu’une
chose: vivre ce rêve le plus longtemps possible, qu’il soit réel ou non.
Même s’ils
semblent très différents de prime abord, l’actrice et le garagiste sont assez
semblables, d’abord à cause de leur enfance difficile (identique à quelques
détails près), mais aussi par leur innocence, qui leur permet de vivre cet
amour simplement, en un si court laps de temps. Une histoire d’amour, certes,
mais dans laquelle les apparences jouent un rôle majeur.
On ferme ce
livre avec un peu plus de lucidité sur le vedettariat et les gens normaux,
ainsi que sur l’importance des apparences dans notre société. Avec ce roman,
Delacourt nous amène la réflexion suivante : nous qui sommes si simples et
anonymes, ne serions-nous pas davantage superficiels que les vedettes de
cinéma, même si la majorité des gens pensent le contraire? Alors que l’actrice
désire un amour simple et vrai, Dreyfuss s’imagine sans cesse dans un décor de
cinéma, avec la musique appropriée pour chaque scène, désirant un amour plus
grand que nature.
Même si l’on
se perd parfois dans des phrases sans fin, le style de l’auteur nous rattrape
vite et nous séduit. Le double niveau de narration (externe et interne) est
subtil et naturel, nous permettant de passer rapidement d’un point de vue
relativement neutre aux pensées d’Arthur Dreyfuss, ainsi qu’aux dialogues
souvent intégrés à même le texte. Si certains espéraient une fin aussi heureuse
que dans La liste
de mes envies, ils seront assurément déçus par le dénouement tragique de
l’histoire (que l’auteur annonce dès le début). Certains déplorent le style
plus saccadé et froid de ce roman, qu’ils associent à une écriture trop rapide
dans le but de surfer sur son succès encore frais, tandis que d’autres
apprécient la férocité du propos et la sensibilité de Delacourt face à des
personnages fragiles aspirant à leur petit moment de gloire.
Un livre qui
touche, somme toute assez dramatique, mais avec un soupçon d’humour qui
désarçonne le lyrisme.